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Black Swan à l'asile, il suffirait d'un cygne !

Black Swan à l'asile, il suffirait d'un cygne !

Le mélomane ne peut se lasser du Lac des Cygnes, absolu chef-d'œuvre de Tchaïkovski. Poussé par sa curiosité, il découvre une nouvelle version pour le Szeged Contemporary Dance Company. Retrouvera-t-il son bien-aimé Cygne noir ? Réponse... 

Black Swan de Tamás Juronics par le Szeged Contemporary Dance Company © Zoltán Tarnavölgyi

Au théâtre du 13ème Art à Paris ce mercredi 29 octobre 2024, pour la première française, la troupe hongroise de la Szeged Contemporary Dance Company a présenté Black Swan de Tamás Juronics. Fondé en 1987, le Szeged Ballet a pris son nom actuel en 1993, avec la nomination de Tamás Juronics au poste de directeur artistique. Pour leur première venue à Paris, le chorégraphe a choisi Carmina Burana, œuvre phare qu’il a conçue pour sa compagnie et cette nouvelle création Black Swan. Cette version est inspirée du film Black Swan de Darren Aronofsky, grand succès au box-office et a valu l'Oscar de la meilleure actrice à Natalie Portman (entraînée par le danseur et chorégraphe Benjamin Millepied). Comme dans l’œuvre cinématographique, l'adaptation du chorégraphe hongrois mêle violence, surnaturel et schizophrénie. 

Les décibels envoient en psychiatrie

Black Swan de Tamás Juronics par le Szeged Contemporary Dance Company © Buduczki Kata

Après tant de chefs-d’œuvre signés Marius Petipa, Rudolf Noureev ou encore La Mort du cygne de Michel Fokine, la question qui se pose pour un chorégraphe du XXIe siècle est comment renouveler l’image du Lac des Cygnes ? Sans grande surprise, sous forme de thriller psychologique, le ballet prend place dans un lieu souvent privilégié par les mises en scène modernes : un hôpital psychiatrique (on pense notamment au Roméo et Juliette de Matthew Bourne). Pour accentuer l’atmosphère oppressante, l'enregistrement de la musique déchirante de Tchaïkovski est diffusé à un volume inconfortablement élevé, un effet sans doute recherché pour renforcer l’expérience. Attachée à son lit d'hôpital et contrainte à l'immobilité par des infirmières, la danseuse Miriam Munno incarne une Odette tourmentée, effrayée et persécutée et l’on remarque son jeu théâtral. Épiée et chaperonnée par une nonne, cheffe de l'hôpital, le Cygne blanc est à la fois malmené et protégé par cette figure qui se veut aussi maternelle. Fidèle à l'œuvre originale, le Prince Siegfried conserve sa naïveté alors qu’il revêt une blouse blanche ! Tombé sous le charme, il fait tournoyer Odette dans les airs lors de jolis pas de deux, mais son rôle reste secondaire (un contraste frappant avec la version de Noureev, par exemple). Malgré cette scène, le Cygne ne semble pas partager cet amour ; elle regrette plutôt sa forme de cygne, qu'elle retrouve au contact du lac symbolisé par une baignoire. Rothbart est également présent, incarné par un médecin féroce prêt à tout pour capturer Odette et laisser Odile séduire le Prince, l'enveloppant de ses immenses plumes. Les personnages sont bien là mais le récit reste confus pour que l’on comprenne les enjeux dramatiques. 

Au fond de la baignoire, la mort du cygne !

Black Swan de Tamás Juronics par le Szeged Contemporary Dance Company © Zoltán Tarnavölgyi

Avec des jeux de lumières insistants, projections vidéo déroutantes et panneaux mobiles efficients sur scène, la conception des décors et les éléments de mise en scène a été confiée à Kazmer Toth. Alors que le spectacle assez appuyé tend plus vers le show, les accessoires très explicites (baignoire, abat-jour en forme de cygne, etc.) n'aident pas pour autant à la compréhension de l’histoire. Les tutus ont été remplacés par des camisoles de force laissant la grâce, la délicatesse et le raffinement s’évaporer à tout jamais ! Dans cette chorégraphie moderne et dense, le talent des danseurs n'est qu'entrevu. Miriam Munno et Diletta Ranuzzi qui incarnent Odette et Odile, possèdent une technique indéniable que l'on aimerait admirer en dehors du contexte schizophrénique et tourmenté de la pièce. Black Swan propose une version explosive de l'œuvre classique qui ravira les amateurs de spectaculaire. Le synopsis complexe offre des interprétations infinies de l'histoire du cygne ; celle de Tamás Juronics en est une. Mais ici, une chose est certaine : le cygne a bel et bien été mis à mort. 

Black Swan de Tamás Juronics par le Szeged Contemporary Dance Company © Zoltán Tarnavölgyi

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