Carte Postale - Académie Orsay-Royaumont
Sortie le 8 janvier 2021 sous le label B Records
Il est des habitudes que l’on risque de prendre très rapidement. Pour la deuxième fois, le label B Records se fait complice de l’Académie Orsay-Royaumont pour sortir l’excitant CD découverte des jeunes artistes participants. Après Le Promenoir des amants (où s’étaient particulièrement illustrés Marie-Laure Garnier, Célia Oneto Bensaid, Jean-Christophe Lanièce et Romain Louveau) paru en septembre 2019, cette « Carte Postale » brosse le portrait de quatre nouveaux duos d’artistes (voix et piano) dans un programme très varié d’œuvres de Reynaldo Hahn, Ernest Chausson, Hugo Wolf, Schubert, Ravel et Poulenc. Avec les extraits du Schwanengesang, le baryton allemand Fabian Langguth s’attaque à un Everest du répertoire où bon nombre de ses compatriotes ont déjà brillé. Grâce à son timbre délicat et une diction élégante, il se fait facilement remarquer même s’il lui manque encore un lâcher-prise pour véritablement incarner le texte. La jolie pianiste Camille Lemonnier qui l’accompagne avec la même délicatesse gagnerait à « salir » la partition en se l’appropriant avec plus de fougue. Elena Harsányi, allemande comme Fabian Langguth, a également choisi trois Lieder de Schubert. Dans ces pièces parmi les plus belles jamais composées (Du bist die Ruh, Nacht und Träume) elle s’expose témérairement à la comparaison, elle aussi ! Pris sur le vif, cet enregistrement, où ressort un vibrato inopportun, ne lui rend sans doute pas suffisamment justice. Magnifiquement interprétés par Toni Ming Geiger, Auf dem See et deux autres Lieder de Wolf la trouvent assurément dans son élément dans une tessiture plus centrale. Talent à suivre de près, le jeune baryton malgache Michael Rakotoarivony ose les Chansons Villageoises de Poulenc et rafle la mise avec un naturel et un abattage que rend fort bien le disque. Même si l’aigu plafonne un peu dans le chef-d’œuvre de Maurice Ravel Don Quichotte à Dulcinée, l’interprète a déjà tout compris des demi-teintes et de la profondeur d’un texte qu’il incarne parfaitement comme sa partenaire, la pianiste Teodora Oprisor très inspirée. La flamboyante Victoire Bunel est l’autre coup de cœur de ce passionnant album de famille Orsay-Royaumont. Comme Marie-Laure Garnier dans le précédent enregistrement, la mezzo est une révélation dans la mélodie qu’elle défend avec un art consommé. Elle compte déjà de nombreux admirateurs qui sont sous le charme de ce timbre clair et chaud, de cette diction exemplaire et de cette fantaisie. Absolument irrésistible, Victoire Bunel n’hésite pas à s’encanailler dans les Quatre Poèmes d’Apollinaire de Poulenc suivie avec tout le sérieux requis par le piano expert de Gaspard Dehaene. Les mélodies de Hahn et de Chausson sont parfaitement choisies