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Sonya Yoncheva en récital au Met en Allemagne

Sonya Yoncheva en récital au Met en Allemagne

Qu’il est long d’attendre ! Les salles fermées s’organisent pour faire patienter leurs spectateurs. Le Met, par exemple, propose en ligne des récitals très haut de gamme comme celui de Sonya Yoncheva. Et si le remède était pire que le mal ? Explications…

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Face à la pandémie, le Metropolitan Opera a été l’une des premières salles d’importance à annoncer l’annulation complète de ses saisons. Très vite, la grande institution newyorkaise a mis en ligne pléthore de rediffusions gratuites de ses productions, doublées bientôt d’une offre payante de récitals de prestige. Depuis juillet 2020, les mélomanes peuvent accueillir les plus grands noms de l’art lyrique chez eux, pour la modique somme de 20 $. Dans le cadre des « Met Stars Live in Concert », Jonas Kauffmann, Renée Fleming, Roberto Alagna et Aleksandra Kurzak, Joyce DiDonato ou encore Anna Netrebko se sont invités sur les petites lucarnes et les écrans d’ordi. Pour garder le lien avec son public et pour conserver l’aspect événementiel de ces nouveaux rendez-vous, le Met limite dans le temps la diffusion et l’exploitation des concerts filmés dans des lieux d’exception. Le 27 février 2021 à 19h, en direct de la bibliothèque rococo du monastère Schussenried, près de Munich en Allemagne, Sonya Yoncheva a ravi ses nombreux admirateurs avec un intense programme d’airs d’opéras.

The Amazing Metropolitan Opera!

Sonya Yoncheva_@ Schussenried (c) MetOpera

Sonya Yoncheva_@ Schussenried (c) MetOpera

Après les inévitables spots de pubs des généreux sponsors sans qui rien de tout cela ne serait possible, il faudra patienter une dizaine de minutes pour voir la magnifique soprano. Les spectateurs ont l’assez bonne surprise d’être accueillis par une autre artiste, Christine Goerke qui va d’abord leur dire tout le bien qu’elle pense de sa collègue en compagnie de Peter Gelb, le directeur du Met en personne. Saluant au passage le courage de ses chanteurs qui jouent devant les caméras ou sur la scène du Metropolitan, il retrace les grands moments de la carrière de Mlle Yoncheva sur la prodigieuse scène du Met et nulle part ailleurs.

Le récital débute enfin avec un sommet, “Ritorna vincitor !” extrait d’Aida de Verdi ou un discret messa di voce se perd dans la grande réverbération de la salle déserte. Le programme est uniquement composé d’airs d’opéra et ne laisse quasiment aucun répit. Quelques minutes sont toutefois concédées où très opportunément, des extraits des productions de Otello ou Tosca « made in Metropolitan Opera » sont diffusées. La production est léchée. Les nombreuses caméras tournoient et permettent à l’artiste de se mouvoir comme elle le ferait sur scène pour incarner gentiment ses personnages. Les spectateurs outre-Atlantique seront sans doute séduits par la vaporeuse cape de mousseline rouge que la soprano fait voler dans les airs, façon diva.

En attendant Sonya Yoncheva

Sonya Yoncheva_@ Schussenried (c) MetOpera

Sonya Yoncheva_@ Schussenried (c) MetOpera

Parfaitement accompagné par Julien Quentin au piano, un récital comme celui-ci est certainement courageux car il s’agit d’une prise sur le vif sans retouche possible comme au disque ou pour un enregistrement DVD. Il serait facile de souligner les quelques défauts d’émission, la tenue des phrases parfois un peu relâchée mais il ne faut pas oublier que présents dans la salle, les mélomanes les remarqueraient à peine. Sonya Yoncheva a composé un programme sans doute trop riche qui met cependant en avant les nombreuses qualités qu’on lui connaît, à commencer par un timbre de toute beauté. Puccini convient mieux à sa voix dans les airs subtils de La Bohème et Le Villi plutôt que dans Madama Butterfly qui expose un aigu trop tendu. La « prière à la lune » de Rusalka de Dvořák est un exemple de délicatesse où la simplicité provoque une émotion pure. Leonora d’Il Trovatore ou Aida, les deux rôles qui ouvrent le récital semblent ici surdimensionnés. A l’inverse, le Dido’s Lament de Purcell et le célèbre Lascia ch’io pianga de Haendel aussi beaux soient-ils, sont presque iconoclastes dans ce programme pour « grande voix ». Les airs français qui concluent le récital, Manon incarnée et Thaïs de Massenet (ou la belle Sonya ne tente pas le suraigu) et la Habanera de Carmen, mettent en évidence que Sonya Yoncheva est une artiste taillée pour la scène, avec un parterre vibrant à ses pieds. Ce récital qui serait l’évident temps fort d’une saison de concert tourne à l’exercice un peu vain. Privée de public et des applaudissements, la bibliothèque de Schussenried ressemble à un écrin mais dans une bijouterie désespérément vide. A l’évidence, nous sommes terriblement impatients de retrouver la brillante artiste dans son élément, à New York sans aucun doute mais surtout sur les scènes d’Europe !

 

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