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Matthias Goerne · Seong-Jin Cho – Im Abendrot

Sortie le 16 avril 2021 sous le label Deutsche Grammophon

L’on n’aborde pas la sortie d’un nouvel album de Mattias Goerne comme n’importe quel autre récital de mélodies. Le plus grand Liedersänger actuel construit une carrière exemplaire ponctuée par quelques CDs qui sont attendus toujours avec impatience comme la matérialisation d’exceptionnels mais éphémères concerts. Depuis quelques années, le baryton renouvelle les expériences en choisissant ses accompagnateurs parmi la nouvelle génération de pianistes. Après un Beethoven avec Jan Lisiecki, le jeune et talentueux Seong-Jin Cho a été choisi pour graver les Wesendonck-Lieder de Wagner et des Lieder signés Hans Pfitzner et Richard Strauss pour Deutsche Grammophon. Lors d’un entretien qu’il nous a accordé au lendemain d’une séance d’enregistrement, le pianiste nous confiait son admiration pour le chanteur et surtout, la facilité avec laquelle s’est monté le projet. A l’écoute, l’entente entre les deux artistes semble en effet évidente mais peut-être plus remarquable encore, le pianiste dialogue plus qu’il n’accompagne. Avec des œuvres aussi iconiques que les Wesendonck ou les Lieder de Strauss bien connus, il est rare d’être étonné, encore plus rare d’être subjugué. La lecture de Seong-Jin Cho à la fois personnelle et respectueuse nous transporte parfois dans une émotion aussi spontanée qu’inattendue. Le livret qui accompagne le disque contient un brillant texte de Christophe Ghristi. Le directeur du Capitole de Toulouse nous éclaire sur la construction du programme qui rapproche habilement le très connu et la découverte, les pièces de Pfitzner étant moins visitées. Le chef-d’œuvre de Wagner écrit pour voix de femme aurait également de quoi surprendre dans la bouche de Matthias Goerne mais la beauté du timbre et la science des mots nous transportent dès la première note. Le baryton est depuis longtemps passé maître dans l’art de la mélodie. Et même si la voix évolue doucement, elle continue à nous fasciner comme au premier jour. Jamais démonstrative, la technique de l’artiste permet des aigus faciles, une ligne de chant et un souffle envoutants toujours au service des poésies à la tonalité doucement mélancolique. Le titre Im Abendrot (Au crépuscule) qui fait référence au dernier des Vier letzte Lieder de Strauss semble tout à fait désigné pour ce printemps 2021, pluvieux et triste mais empli de beauté.