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Alexandre Dumas et la musique - Karine Deshayes, Marie-Laure Garnier, Kaëlig Boché

Sortie le 23 octobre 2020 sous le label Alpha

L’année 2020 a été largement gâchée par l’ouragan Covid qui a emporté avec lui les célébrations Beethoven. Toutefois le grand compositeur a eu les honneurs du disque avec de nombreuses sorties mais tous les grands hommes n’ont pas eu cette chance. En 2020, peu d’événements ont pu être organisés autour d’Alexandre Dumas, mort 150 ans plus tôt. Le célèbre écrivain a collaboré avec des compositeurs pour des livrets d’opéras. Les mélodistes ont également emprunté ses mots pour créer parmi les plus belles pages de musique. La sortie en octobre du recueil « Alexandre Dumas et la musique » est une double aubaine pour rendre hommage à la langue du grand homme mais également pour découvrir la richesse des inspirations. Un vaste éventail de compositeurs est ici présenté avec des noms illustres (Berlioz, Liszt, Messager, César Franck), moins connus (Gilbert Duprez) ou largement oubliés (Joseph Doche, Hippolyte Monpou, Alphonse Varney, Edmond Guion, Henri Reber, Francis Thomé). Des mélodies de Massenet, Duparc et Benjamin Godard complètent ce beau florilège. Et pourtant, entre Dumas et la musique, il est peu de dire que c’était mal parti ! Dans le livret, le spécialiste dumasien Claude Schopp rapporte ses propos : « La poésie n’aime pas la musique, parce qu’elle est elle-même une musique. Quand la poésie a affaire à la musique, elle n’a donc point affaire à une sœur, mais à une rivale ».

La gageure pour les artistes est donc de faire mentir monsieur Dumas. Avec un plateau de très grands chanteurs qui connaissent la valeur du mot (Marie-Laure Garnier, Karine Deshayes et Kaëlig Boché) et des accompagnateurs tout aussi délicats (Raphaël Jouan et Alphonse Cemin) c’est partie gagnée. Leur diction est un atout majeur pour goûter la prose et la poésie même s’il est autorisé de trouver certaines pages un peu chargées. Avec la musique de Liszt, le texte de Jeanne d’Arc au bûcher semble par exemple terriblement pompier. On est toutefois conquis par un charme ambiant et une diversité de climats qui rendent l’écoute passionnante. Il est amusant de comparer les textes des deux dernières mélodies aux univers opposés. Il est également attachant d’entendre deux jeunes artistes à l’aube de leur carrière côtoyer une artiste au firmament. L’instantané que représente cet enregistrement trouve en Marie-Laure Garnier et Kaëlig Boché deux merveilleux chanteurs et déjà excellents diseurs avec des voix qui ne demandent qu’à s’épanouir naturellement avec parfois quelques stridences dans les aigus. Karine Deshayes en marraine bienveillante semble leur montrer le chemin de la perfection. A chaque intervention, c’est une évidence. A ce titre, la berceuse de Jocelyn est un pur joyau. Ce morceau de 6’14’’ vaut à lui seul l’acquisition de ce disque qui renferme bien d’autres merveilles.