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La Paris Opera Competition 2019 au Théâtre des Champs-Elysées couronne trois nouvelles stars

Le mélomane est toujours excité à l’idée de découvrir les nouveaux talents. Lorsqu’une prestigieuse compétition se déroule au Théâtre des Champs-Elysées, il se précipite et il ne le regrette pas. Avec la Paris Opera Competition 2019, il a vécu un grand moment. Explications…

Les concours sont des instantanés précieux dans la vie d’un artiste. Souvent, ils offrent le tremplin idéal pour lancer une carrière en projetant la lumière sur de jeunes talents confirmés. Julia Lezhneva, Julie Fuchs ou Ambroisine Bré sont les noms des lauréats qui font le prestige de la Paris Opera Competition, les Mozart de l’Opéra. Dans le paysage lyrique français, le concours se détache aujourd’hui notamment grâce à la direction artistique de Jérôme Angot, brillant démiurge qui a su admirablement choisir les dix finalistes de l’édition 2019.

Roselyne Bachelot © DR

Ce vendredi 18 janvier 2019, l’émotion était présente au Théâtre des Champs-Elysées car pour la première fois, la compétition a eu lieu sans son créateur Pierre Vernes, disparu trop tôt. Un hommage vibrant a été rendu par Isabelle de Montaigu, co-fondatrice et par Nicola Oppermann-Labourdette, la présidente sous l’œil bienveillant de Roselyne Bachelot, truculente présentatrice de la soirée. Empêtrée à vouloir expliquer la dramaturgie, la fausse ingénue a mis les spectateurs dans sa poche. La mise en scène fluide de Florence Alayrac a eu le grand mérite de tisser intelligemment un fil entre les différents airs et ensembles.

10 concurrents pour être le Mozart de l’Opéra 2019

Après l’ouverture de Carmen de Bizet dynamique et éclatante, la sixième édition a débuté avec la première candidate. La soprano chilienne Yaritza Veliz a choisi avec discernement l’air « Deh vieni, non tardar » des Nozze di Figaro de Mozart pour exposer son très joli timbre et une voix bien conduite avec toutefois une prononciation à améliorer. De bonne tenue, le duo de Lucia di Lammermoor a permis d’entendre la soprano anglaise Julia Sitkovetsky et David Astorga, ténor du Costa Rica. L’autre anglais de la compétition, le baryton Benjamin Lewis a fait un choix judicieux avec l’air de Griaznoï extrait de La Fiancée du tsar de Rimski-Korsakov, pour mettre en avant une voix chaleureuse qui manque encore de projection.

Melissa Petit © DR

La sélection des arias est un enjeu majeur dans une compétition. Avec le célèbre « Ah non credea » de La Sonnambula de Bellini, Mélissa Petit a osé la prise de risques car les jurés ont tous dans l’oreille les grandes belcantistes qui se sont illustrées dans le rôle. Admirablement conduite, la voix de la soprano française est un enchantement qui nous a offert le premier frisson de la soirée grâce à cette fragilité maîtrisée et un souffle magnétique.

Avec la noirceur adéquate et même si l’aigu final n’est pas sorti comme on l’attendait, la mezzo-soprano israélienne Zlata Khershberg a également impressionné en Principessa di Bouillon (d’Adriana Lecouvreur de Cilea). Après un charmant duo Dulcamara/Nemorino avec le baryton français Jérôme Boutillier et le ténor chinois Shan Huang, Ilya Kutyukhin l’avant-dernier candidat a immédiatement conquis le public. Avec un timbre magnifique et une belle variété de nuances, le baryton russe est la parfaite incarnation du Prince Yeletsky (dans La Dame de Pique de Tchaikovsky) malgré un certain statisme sur scène. Question de choix toujours, la mezzo-soprano norvégienne Lilly Jørstad déçoit hélas ! dans le fameux aria de La Cenerentola de Rossini qu’elle ne maîtrise pas à la perfection pour s’y imposer.

Russie, France, Chili et Israël au coude à coude

A l’entracte, l’on devine qu’il sera difficile aux treize membres du jury de départager les vainqueurs tant le niveau est élevé. Même si quelques personnalités se détachent déjà, tout se jouera donc dans la deuxième partie. Les attentes ne seront pas récompensées concernant les ténors, tous deux dépassés par une technique trop fragile. Même s’il ne démérite pas, vocalement plus effacé Benjamin Lewis a bien du mal à s’imposer en Don Giovanni ou en Hamlet tout comme la mezzo Lilly Jørstad. La prestation de Julia Sitkovetsky dans la Reine de la Nuit laisse perplexe. Avec un aigu qui manque de précision, l’on se demande si ce timbre chaud convient vraiment à la rage de l’héroïne de Mozart ?

Jérôme Boutillier © DR

En revanche, Jérôme Boutillier se révèle à son meilleur dans l’air de Posa extrait du Don Carlos de Verdi, version française. Admirablement épaulé par Pierre-Michel Durand à la tête de l’Orchestre Prométhée, il incarne facilement le personnage. Le chef d’orchestre a été un soutien de tout premier ordre, chaque répertoire ayant été défendu avec style. Dans les afflictions d’Ophélie (Hamlet d’Ambroise Thomas), Melissa Petit est émouvante au-delà du possible. Face à Ilya Kutyukhin souverain, Zlata Khershberg déploie de grands moyens dans le duo de La Favorite avec toutefois une prononciation à travailler. Comme elle, Yaritza Veliz confirme qu’elle est une artiste à suivre de près.

Et le grand gagnant de la 6ème Paris Opera Competition est…

Ilya Kutyukhin © DR

Le choix du prestigieux jury pour le premier prix est incontestable car il a été confirmé par celui du public. Le baryton Ilya Kutyukhin remporte la compétition aux côtés de Jérôme Boutillier et de Mélissa Petit récompensés également.

Retrouver bientôt ces artistes primés et les autres sur les plus grandes scènes internationales est une évidence lorsque l’on énumère le nom des jurés (Anne Blanchard directrice artistique du Festival de Beaune, Peter de Caluwe directeur général du Théâtre Royal de la Monnaie de Bruxelles, Fabrizio Carminati chef d’orchestre, Michel Franck directeur général du Théâtre des Champs-Elysées, Christophe Ghristi directeur artistique du Capitole de Toulouse, Jean-Louis Grinda directeur de l’Opéra de Monte-Carlo et des Chorégies d’Orange, Richard Martet rédacteur en chef d’Opéra Magazine, Joan Matabosch directeur artistique du Teatro Real de Madrid, Pål Christian Moe consultant pour le Bayerische Staatsoper Munich et le Festival de Glyndebourne, Laurent Pelly metteur en scène, Eve Ruggieri productrice et animatrice de télévision et de radio, Christoph Seuferle directeur artistique du Deutsche Oper Berlin et Dmitry Vdovin directeur artistique du Young Artist Program du Théâtre du Bolshoï).

Revivez toute la soirée en replay ci-dessous :