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Beethoven côté chambre avec la Philharmonie de Dresde

La Dresdner Philharmonie est l’un des orchestres allemands les plus importants. En cette grand année Beethoven, elle ne pouvait pas faire l’impasse sur le compositeur Numéro 1. Mais en choisissant un format inhabituel, son chef a créé la surprise. Explications...

Dresdner Philharmonie © Rittershaus Pauly

La saison 2019-2020 de la Dresdner Philharmonie est marquée par plusieurs anniversaires. La célèbre phalange orchestrale de la capitale de la Saxe existe depuis 150 ans et la salle qui l’accueille, le fameux Kulturpalast, a été inaugurée il y a tout juste 50 ans. Mais l’événement qui anime toute la sphère musicale cette année est bien entendu le cent-cinquantième anniversaire de Beethoven. Ce 22 février 2020, Dresde a mis en vedette le maître allemand de façon assez originale en enchâssant la Symphonie No. 4 entre deux quatuors, un choix assumé par le nouveau Directeur Artistique. On ne présente plus Marek Janowski. A 80 ans, le chef a laissé son empreinte à l’Orchestre Philharmonique de Radio France et plus récemment au Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin. Son retour à la Dresdner Philharmonie qu’il a déjà dirigée de 2001 à 2003 est un signe de confiance et surtout pour les mélomanes, la garantie d’une qualité enviable.

Des musiciens parmi les spectateurs

Marek Janowski © Oliver Killig

La quatrième symphonie de Beethoven a le défaut de se trouver entre la troisième et la cinquième, deux immenses chef-d’œuvres qui l’occultent sans doute. Elle possède pourtant bien des beautés que rendent à merveille un orchestre et un chef concernés. Grand spécialiste du compositeur, Marek Janowski qui dirige sans partition, livre une interprétation fascinante d’une incroyable jeunesse. Ainsi jouée, l’œuvre abandonne le contemplatif et un second degré « faussement joyeux » pour ne traduire que l’élan vital. A ce titre, le second mouvement Adagio est pris plutôt rapidement et de façon volontaire, tout comme l’Allegro vivace débordant d’énergie. Les divers pupitres très à l’écoute suivent leur chef sans aucune difficulté. Janowski enchaine le troisième et le quatrième mouvement et offre ainsi encore plus de fluidité à cette vision solaire qui conjugue allant et clarté. Il est d’ailleurs plaisant de voir les musiciens de l’Orchestre philharmonique de Dresde vivre la musique. Quelques membres se sont glissés subrepticement parmi les spectateurs pour entendre les quatuors également au programme. Cette anecdote est assez parlante car elle traduit l’engouement de ces professionnels toujours mûs par la passion de la musique classique.

Beethoven pour petite et grande formations

Quatuor Ebène © Julien Mignot

La passion semblait partagée par le public venu nombreux écouter un concert a priori exigeant, les œuvres inscrites au programme n’étant pas les plus populaires et surtout, le mélange des genres ayant plutôt tendance à faire fuir les spectateurs. Il est en effet rare de coupler musique de chambre et grand symphonique. Et pourtant, en choisissant le quatuor No. 3 composé en 1806 comme la symphonie, les programmateurs ont fait preuve d’une belle logique. Même si le son semble tout d’abord un peu lointain, l’acoustique du Kulturpalast de Dresde porte assez bien les petites formations. Il faut dire que le Quatuor Ébène excelle en raffinement et offre une palette de nuances très large avec de nombreux détails. Le second mouvement Andante très habité est l’un des plus beaux moments du concert. Imprégnés des notes envoûtantes de Beethoven, les instrumentistes si jeunes et déjà si talentueux respirent à l’unisson et semble raconter une même histoire. En deuxième partie, les Ébène ont choisi le quatuor « Les Harpes », opus 74 pour mettre en valeur dans le Presto, leur dynamisme énivrant et une virtuosité d’autant plus appréciée qu’elle n’était pas démonstrative. Plus de doute alors, quatuors et orchestres symphoniques peuvent jouer à armes égales, ou presque. Comme chez lui à Dresde, Beethoven a été porté haut grâce à une Dresdner Philharmonie et un Quatuor Ébène des grands soirs.