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Cyrille Dubois et Tristan Raës, beautés franco-allemandes aux Invalides

Tous les grands amateurs mélomanes savent que Cyrille Dubois et Tristan Raës forment l’un des plus parfaits duos dans la mélodie. Lorsque les Invalides leur proposent d’explorer la mélodie française et le Lied allemand, comment résister ? Compte-rendu…

Cyrille Dubois et Tristan Raës © Jean-Baptiste Millot

La saison musicale des Invalides réserve encore de très belles surprises. Ce lundi 16 mai 2022, sous le portrait du Roi soleil, le Grand Salon du Musée de l’Armée et Christine Helfrich (responsable artistique de la programmation) ont accueilli le Duo Contraste pour un récital comme l’on aimerait en entendre plus encore. Le ténor Cyrille Dubois et le pianiste Tristan Raës ont interprété des Lieder de Brahms, Wagner et Richard Strauss en écho à des mélodies de Franck, Chausson et Fauré pour évoquer la Société nationale de musique. Fondée le 25 février 1871 (après la défaite de Sedan) par Romain Bussine et Camille Saint-Saëns, l’association avait pour but de réaffirmer la grandeur et la primauté de la musique française face à la tradition germanique. La devise « Ars Gallica » est restée célèbre avec un nationalisme qui n’a plus de raison de raison d’être, fort heureusement ! Le ténor français aussi à l’aise dans la langue de Goethe que dans celle de Molière connait le succès en Allemagne, en Europe et sur toutes les scènes lyriques internationales.

Avec Cyrille Dubois et Tristan Raës comme après un rêve 

Cyrille Dubois et Tristan Raës / Musée de l’Armée © CR

Depuis quelques mois, la sortie de l’enregistrement d’une intégrale des mélodies de Fauré est annoncée (et il semble qu’elle fera date). En avant-première et comme un avant-goût (le triple CD sera disponible le 27 mai 2022), les artistes ont interprété quatre pièces du compositeur dont un « Clair de lune » d’un raffinement rare. En bis, « Après un rêve » susurré délicatement atteint un nouveau sommet grâce également au piano raffiné et parlant de Tristan Raës. Il est dommage que les lumières se soient rallumées si vite car malgré ces trois généreux bis fauréens, l’on avait encore faim ! Les César Franck qui ont ouvert le récital en amuse-bouche ont permis de savourer le grand art d’un mélodiste d’exception. La diction sert un texte déclamé avec évidence et toujours beaucoup de sensibilité. Le Duo Contraste a construit le concert en faisant alterner pièces rapides et lentes, élégiaques et dynamiques, forte et piano. La voix peut ainsi explorer tous les univers en déployant des moyens d’autant plus impressionnants qu’ils ne recherchent jamais l’effet gratuit. Seuls les deux Wagner extraits des Wesendonck Lieder dévolus le plus souvent aux sopranos sont moins convaincants (« Stehe still ! » étonnamment  trop forte). Le peu de mélodies très connues n’a jamais empêché le plaisir du mélomane qui aurait été redoublé avec une traduction des textes allemands dans le programme de salle. Les magnifiques et rares Mädchenblumen, op. 22 de Richard Strauss auraient sans aucun doute séduit encore plus. Malgré ce détail, « Es hing der Reif » de Brahms a laissé bouche bée comme « Le colibri » de Chausson. La charmante mélodie souvent entendue trouve dans l’interprétation de Cyrille Dubois et de Tristan Raës un idéal. Chaque mot, chaque note suspendue sublime un texte qui prend alors une dimension insoupçonnée. L’un des parfaits moments que cette soirée de mai ensoleillée où la beauté était l’invitée d’honneur.